Altruisme – Acte désintéressé ?

  • jasper

    Membre
    1 juin 2019 à 22 h 33 min

    @etienne31 comme je l’ai écrit plus haut, je crois aussi que l’altruisme véritable est désintéressé, mais la question qui me tracasse est la motivation. L’empathie est une motivation de l’altruisme, c’est sûr et ce n’est pas très important qu’elle soit  cognitive ou émotionnelle. Mais, pour moi s’il y  a motivation, il y a récompense, sous une forme ou une autre, car c’est un principe qui semble assez universel dans les organismes vivants.

     

    Ceci dit, curieusement, j’ai découvert une expérience qui prouve qu’une  motivation calculée,  ou en quelque sorte consciente, n’est pas celle qui compte le plus : deux groupes d’ados A et B ont été chargés de s’occuper de personnes âgées. A la fin, le groupe A a été récompensé avec une toute petite somme d’argent, et pas l’autre.

     

    Quand, quelque temps plus tard, on a redemandé aux ados s’ils voulaient retourner s’occuper des personnes âgées. Le groupe B, Ceux qui n’ont pas été récompensées ont dit OK, ceux du groupe A, qui ont été récompensés ont refusé.

     

    L’explication serait que la petite somme d’argent est trop faible pour motiver A, mais qu’elle a détruit une autre motivation, plus inconsciente,  mais suffisante pour pousser B à vouloir recommencer. Le sentiment d’avoir aidé la personne âgée fait très bien office de récompense à elle seule. Mais là encore ça n’est pas exactement “désintéressé”.

     

    Malgré tout, je me dis finalement qu’il existe peut-être  un altruisme complètement désintéressé, qui ne demande aucune récompense (aucune motivation). Ca pourrait exister plus que je ne le pensais de prime abord.

     

    Une situation où l’on fonctionne sans motivation est lorsque l’apprentissage a automatisé un comportement. Ca voudrait dire que l’altruisme désintéressé est aussi le résultat de l’apprentissage?

     

    C’est possible : Mathieu Ricard que j’ai réécouté avec les liens plus haut, et la conférence sur les neurones miroirs, citent tous deux l’exemple du piano, et c’est peut être une clé :

     

    Pour jouer du piano, il faut apprendre. Au début quand on apprend le piano, on réfléchit beaucoup, on travaille et on fait des efforts (par exemple pour plaire à ses parents qui ont très envie qu’on sache jouer du piano. Ou alors, pour la guitare, on s’y met pour draguer les minettes le soir devant un feu de camp). A ce moment là, on fait usage de la cognition et on a du mal à jouer. On agit par ce que tu appelles “intéressement” .

     

    A force de travail et de pratique, on en arrive à jouer sans y penser, et on improvise un truc gai quand on est joyeux, et triste si l’on a des idées sombres. La technique est acquise et c’est devenu un mode de fonctionnement habituel et que l’on maîtrise sans effort. Un certain nombre d’actions complexes, de décisions concernant la manière de mettre ses doigts comme il faut pour jouer sont prises en charge par l’inconscient cognitif, et on ne se pose plus de question de ce qu’il faut faire ou pas. On joue juste parce qu’on sait jouer, on a acquis un talent.

     

    C’est peut être pareil pour l’altruisme : au début on le pratique en cherchant une récompense (le sentiment de faire le bien) ou par imitation (puisqu’il semble démontré que les parents altruistes ont des enfants plus altruistes que les autres), et, petit à petit, ça devient un mode de fonctionnement , une habitude, qui n’a plus besoin de motivation. L’altruisme devient alors désintéressé.

     

     

     

     

  • jasper

    Membre
    1 juin 2019 à 22 h 51 min

    oups,

    au lieu de “comme je l’ai écrit plus haut, je crois aussi que l’altruisme véritable est désintéressé,”

    j’aurais du écrire

    “comme je l’ai écrit plus haut, je crois aussi que l’altruisme véritable devrait être désintéressé, ” car j’avais écrit plus haut qu’il ne l’était en fait pas…

     

  • Membre Inconnu

    Membre
    1 juin 2019 à 23 h 27 min

    @jasper par définition l’altruisme est désintéressé.
    C’est pour cela que je parle de “pseudo altruisme”.
    Si je me compare à mes frère et soeur, même éducation, mais notion différente de l’altruisme.
    J’ai un altruisme naturel, sauf envers une personne qui aura fait du tort à d’autres. Pour ces dernières personnes, mon altruisme sera modéré par l’intellect. Il persistera, mais la portée d’action sera orientée en fonction. La personne perdra donc le bénéfice de la portée altruistique. Celle ci pouvant aussi être aténuée par d’autres facteurs. Par exemple, une personne que je sais dans le besoin et avec très peu de moyens financier, j’aurais désir à lui faire cadeau d’un médicament normalement facturé, peu importe le prix du médicament en question. Cependant, pour une personne richissime, je lui demanderais de payer un surplus pour compenser le fait que d’autres n’ont pas les moyens d’êtres soigné.
    J’aurais donc en horreur ces riches qui demandent des ristournes, et dans le pire des cas, je refuserais même que ces malades mentaux soient soignée, tout simplement. Qu’ils crèvent, même, puisqu’ils ne veulent pas partager leurs richesses, qu’ils n’ont de toute façon certainement pas acquises de façon honnêtes. Ce qu’ils ont pris, ces riches, cela manque certainement aux pauvres qui n’ont pas moyen de se payer le médicament en question après tout.
    Donc il s’agirait là d’un véritable altruisme conditionné par le mental et l’intelligence.
    Un altruisme non pas au service d’un individu, mais au service de toutes les formes de vies dans leur globalité.
    En somme, un altruisme Divin.
    Voilà de quel bois je suis fait ! 😀

    Mais je conçoit aussi que les individu très peu voir pas du tout empathique ne comprennent pas cette notion d’altruisme, ce qui reste alors pour eux un mystère aussi mystérieux que l’origine de la vie.
    Comme je les plaints …

  • jasper

    Membre
    2 juin 2019 à 9 h 44 min

    c’est super @etienne31 tu as de la chance d’avoir été précablé avec un altruisme naturel.

    Mais j’aime bien l’idée que l’altruisme puisse être acquis par l’apprentissage. Ca voudrait dire que le prosélytisme de l’altruisme fonctionne et qu’il est contagieux. Des personnes comme toi seraient le cas zéro d’une épidémie bienfaisante.

    Mais faut-il vraiment plaindre et  rejeter ceux qui ont fait du mal à d’autres, plutôt  de leur montrer, pour qu’ils l’apprennent lentement, qu’il y a moyen de vivre autrement?

  • Membre Inconnu

    Membre
    2 juin 2019 à 9 h 57 min

    Je te rejoint là dessus.
    Je parle même d’altruisme égocentrique.
    Faisant démonstration de l’intérêt de chacun à prendre soin des autres. A quel point il peut y avoir un effet boomerang, aussi bien dans le mauvais sens que dans le bon sens.
    En fait, c’est plus une démonstration visant à élargir l’univers des actions et leurs conséquences, et à faire prendre conscience de facteurs qu’autrement on ignorerait ou auxquels on ne pense pas assez.
    Parler à l’égo des individu est souvent un raccourci simpliste, mais efficace. Cela ne fonctionne cependant pas toujours.
    Certains individu, paradoxalement, se figure qu’ils sont les seuls à être égocentriques, ce qui est très drôle d’une certaine façon.
    Il n’ont pas conscience du facteur “et si tout le monde faisait comme moi ?”. Ce qui est assez normal pour un égocentrisme extrême dans lequel les autres n’existent de toute façon pas.
    Et l’altruisme empathique seul ne garanti pas un véritable altruisme pur et dur … l’intelligence vient compléter efficacement l’ensemble.
    C’est en cela que faire appel à l’intelligence d’autrui pour devenir altruiste fonctionne quand même bien, car on a tous cette sensibilité à l’autre plus ou moins développé.
    Finalement, un “pseudo altruisme” vaut quand même mieux que pas d’altruisme du tout, même si celui ci est le fruit d’un savant calcul, tant que ce dernier vise au pire un intéressement mutuel et non un intéressement à sens unique en faveur du “pseudo altruiste” (comme un usurier par exemple).

  • valentin14

    Membre
    7 juin 2019 à 19 h 12 min

    L’empathie, si j’ai bien compris, c’est se mettre à la place de l’autre pour ressentir sa souffrance

    Pourrait-on dire que l’altruisme peut se manifester non pas en effectuant quelque chose pour l’autre ou pour le groupe de façon purement désintéresser (et dans ce cas l’empathie est difficile d’accès) mais plutôt d’inclure l’autre de mon groupe ou bien de m’inclure dans le groupe à qui j’apporte quelque chose ?

    Ainsi, sous cette hypothèse, l’altruisme pour qu’il puisse s’exprimer sur la durée et non pas comme un acte ponctuel, consisterai à s’intégrer au groupe auquel on vient en aide, et l’empathie n’est plus seulement une projection de mes ressentis mais une réelle mutualisation des souffrances et des joies. L’altruisme devient donc nécessaire au développement du groupe, et l’individu n’est plus ni égoïste (le pseudo altruisme dont Etienne parle) ni un acte purement désintéressé qui me semble difficile sur la durée d’un point de vue nature humaine ?

    Cela vous semble-t-il un bon compromis pour éviter le pseudo altruisme dont parle Etienne ? Ou bien peut-être que je suis hors sujet ?

  • Membre Inconnu

    Membre
    11 juin 2019 à 10 h 57 min

    On parle beaucoup de l’amour “inconditionnel” et quand tu dis “désintéressé”, je pense qu’on peut rapprocher les deux.

    Ceci dit, après avoir étudié longtemps la question, je crois qu’il faut être honnête, c’est assez rare, même si toutes les intentions du monde sont bonnes. Pas de jugement là-dessus, simple constatation. D’abord parce qu’à la base c’est contre-nature, il est très difficile d’être exempt d’agenda caché, même si ce n’est pas toujours conscient. La psychologie sociale nous apprend qu’une première impression est immédiate et reste engrammée (même si elle est biaisée), ou qu’on se cherche toujours un ou plusieurs “groupes” d’appartenance (normal, réflexe archaïque de survie), etc… Si quelque chose même infime ne répond pas à nos critères selon un curseur qui nous est complètement personnel, on va avoir du mal à le recevoir inconditionnellement. Il nous faudrait une immense sagesse et une totale transparence avec nous-même pour incarner cette totalité et en dehors de grandes figures spirituelles qui ont marqué les esprits ou les époques, pour nous petits scarabées il est souvent compliqué de faire abstraction de notre histoire, notre inconscient, nos réflexes, nos mécanismes internes…etc…

    J’ai longtemps travaillé dans des milieux associatifs ou médicaux et paramédicaux, censés offrir une dévotion et un service sans égal. Ca n’a pas fait exception à la règle, la sélection naturelle est identique à ailleurs. Mais on ne le fait pas exprès :-).  Là où l’on s’en rapproche le plus, c’est en amitié parce qu’en général il n’y a pas d’enjeu. Accepter l’autre dans son entièreté, c’est d’abord se reconnaître en lui, ne rien prendre, tout donner, ne rien attendre,  être en accord complet avec tout ce que l’on est. Un travail de tous les instants. Mais c’est tellement beau quand on y arrive, non pas à le “faire”, mais à l'”être”,  simplement.

  • valentin14

    Membre
    13 juin 2019 à 17 h 53 min

    Bonjour tout le monde,

    Aann, toi qui semble très avancée sur la question, peut-on dire que, l’altruisme semblant inaccessible, il faut pour éviter l’égoïsme (en exagérant un peu le contraire de l’altruisme), prendre conscience d’une interdépendance avec les autres, afin de s’inscrire dans le groupe et ainsi s’aider soi et autrui ?

    (Peut-être serait-il pertinent de créer un sujet “liberté et interdépendance” pour en parler plus avant).

  • Membre Inconnu

    Membre
    13 juin 2019 à 18 h 21 min

    Valentin,

    L’altruisme n’est pas inaccessible, sinon l’humanité serait éteinte depuis bien longtemps ;-). Je dirais plutôt que c’est un chemin initiatique. Le plus beau et le plus profond sans doute.

    Etant par essence des êtres de relation, nous sommes tous en interdépendance quoiqu’on en dise. On ne bâtit rien tout seul, que ce soit du plus petit comme du plus grand. Certaines traditions premières définissaient ça comme “je suis un autre toi-même” ou “il n’y a pas d’autre” en faisant référence au fait que nous sommes chacun une infime parcelle d’un même tout.

    Quant à l’égoïsme…il y a bien des définitions selon les écoles. Ca peut être un subtil jeu de masques, indices de notre degré de maturité ou de connaissance de soi. Défense, prudence, instinct de survie archaïque, ou alors fusion monstrueuse, résonance plus ou moins bien supportée… qui sait ce qui se joue réellement ?

    Mais je ne crois pas qu’on puisse être indifférent à qui que ce soit. Ou alors, c’est qu’on est dans un coma émotionnel profond, ou atteint d’une pathologie psy.

    Un lien est toujours le fruit d’une alchimie d’émotions complexes. Le bon équilibre est fragile, volatile, pas facile à maintenir dans la durée. Mais c’est ainsi qu’on grandit, qu’on s’améliore, qu’on se décentre et surtout que depuis la nuit des temps, on est encore là, ici et maintenant, pour  y réfléchir et échanger autour ;-).

  • valentin14

    Membre
    13 juin 2019 à 22 h 41 min

    J’entendais évidemment de l’altruisme comme acte purement désintéressé. Bien sûr que l’altruisme existe et heureusement, mais j’ai l’impression que tu disais qu’en effet il s’agit aussi d’envies conscientes ou inconscientes d’identifications aux groupes. L’altruisme est une façon de s’accomplir soi en aidant les autres à s’accomplir eux même et c’est pour cela que l’instinct nous pousse vers des groupes semblables, en tous cas c’est comme cela que j’ai compris ton message. Je suis d’accord sur l’intérêt suprême de partager les points de vus et les expériences et je te remercie de le faire avec nous :).

    Merci et à bientôt j’espère pour de nouvelles discussions.

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