Tout savoir sur le biais de confirmation
Le biais de confirmation est un biais cognitif qui figure parmi les plus connus, aux côtés de l’effet Dunning Kruger et de l’effet Barnum, ce dernier biais étant particulièrement célèbre auprès des adultes à Haut Potentiel Emotionnel et/ou Haut Potentiel Intellectuel.
Qu’est-ce que le biais de confirmation ? Définition
Ce biais est à rapprocher de la notion de cherry picking (“picorage”, ou “cueillette sélective”), qui consiste à choisir soigneusement – et uniquement – les éléments, faits, anecdotes et autres informations qui vont dans le sens de ce que nous croyons déjà au préalable.
Dans le même temps, notre cerveau va minimiser tout ce qui pourrait remettre en question ces mêmes croyances, au risque de nous enfermer dans une “boucle de rétroaction positive” – ou un “cercle vicieux”, si l’on souhaite s’exprimer plus simplement 😉
On parle d'”attention sélective”, puisque notre cerveau trie, le plus souvent sans que nous nous en rendions compte (a fortiori si nous n’avons jamais entendu parler de l’existence du biais de confirmation !), de manière à nous maintenir en vie, à minimiser notre stress, et à nous inciter au mouvement.
Nous pourrions pousser le bouchon et évoquer avec un peu d’humour et beaucoup de dérision une “attention subjective”, par opposition à un “attention objective” qui serait dénuée de tout biais individuel. Bien entendu, cette dernière n’existe pas – et c’est peut-être mieux ainsi !
La mémoire vient ensuite sauvegarder tout ces éléments triés avec soin, de manière à consolider nos croyances, de façon à booster à la foi égo et confiance en soi. Pour être exact, il faudrait rappeler ici que les souvenirs, même à très court terme, ne sont eux non plus en aucune façon “objectifs” : notre cerveau reconstruit, transforme, fabrique une histoire, un narratif, et nous convainc dans le même temps qu’il ne peut en avoir été autrement.
Zone de confort, toujours, et un confort si séduisant qu’il peut conduire à… une radicalisation.
Lorsque nous ignorons le biais de confirmation, l’oublions, voire le nions, nous sommes d’autant plus susceptibles de créer une réalité sur simple base d’anecdotes. Et qui ne connaît pas quelqu’un qui connaît quelqu’un qui a vécu ceci ou cela ? C’est la porte ouverte à toutes les grilles de lecture du monde, jusqu’aux plus farfelues, y compris naturellement les théories du complot.
Voici quelques exemples de biais de confirmation :
Recherche sélective
Imaginons que vous avec une lecture politique du monde très ancrée à gauche. La tentation est grande de s’informer sur Libération, le Nouvel Obs ou l’Humanité, car c’est au sein de ce type de publications que l’on a le plus de chances de croiser des papiers qui abondent dans notre sens.
Avec un sentiment de bien-être, de plaisir, et l’impression d’être intellectuellement et moralement dans le vrai. Ce qui, avouons le, n’a pas de prix 🙂
Ainsi, même si nous sommes engagés dans un processus de recherche active d’informations, nous risquons d’en rejeter certaines au simple motif que la lecture risque de plomber notre moral pour la journée – ici, cela pourrait revenir à lire Le Figaro, Le Point, ou pire, Valeurs Actuelles.
“Les heures les plus sombres de notre histoire”, quelque chose comme ça.
Si vous êtes persuadés que les pyramides ont été construites par des aliens, vous allez bondir avec enthousiasme sur tout nouvelle donnée qui tend à aller, même de manière très précautionneuse, dans cette direction. Dans le même temps, vous allez tout simplement ignorer tous les contenus qui émettent d’autres hypothèses, qu’elles s’appliquent à déconstruire ou dénoncer vous croyances, ou simplement à soutenir d’autres hypothèses.
Un effet peut venir renforcer encore le biais de confirmation : l’effet de post-rationalisation. Ici, le cerveau autorise le doute, voire l’encourage, jusqu’à qu’une décision soit prise. A partir de ce moment, la personne va s’accrocher à tout ce qui va lui permettre de se dire que sa décision a été la bonne et écarter, parfois violemment, tout ce qui pourrait lui faire penser qu’elle a fait une erreur.
Le problème, ici encore, n’est pas d’avoir pris une bonne ou une mauvaise décision, d’avoir accepté une bonne ou une mauvaise explication, mais le fait que le doute fondé, l’incertitude raisonnée, la capacité de continuer l’analyse, est perçue comme quelque chose qui empêche d’aller de l’avant. Un démon, en somme, qu’il faut balayer d’un revers de main.
Et si l’être humain était plus un animal d’action que de raison ?
Interprétation sélective
Beaucoup confondent observé et observateur, réalité et grille de lecture, fait et opinion. De fait, et afin d’éviter tout dissonance cognitive, nous tendons à lire des informations contradictoires comme si elles allaient dans le sens de notre croyance, parfois au prix d’une incroyable gymnastique intellectuelle qui sera perçue par l’extérieur comme de la mauvaise foi – alors qu’il s’agit d’aveuglement !
Il faut reconnaître qu’il n’y a rien de plus facile que de remodeler quoi que ce soit afin de faire rentrer une pièce dans une case donnée, cette case étant, bien entendu, construite au préalable en fonction de nos croyances.
C’est aussi pour cela que l’on parle parfois de “sciences molles” car, en effet, il est possible de mener différents raisonnements à partir d’éléments a priori identiques et de parvenir à dérouler des scénarios forts différents, parfois même totalement à l’opposé les uns des autres. Il est alors tenant pour certains d’en conclure, fort hâtivement, qu’il ne s’agit pas de science. La “réalité” ne serait-elle pas elle-même “molle” ? La physique quantique s’intéresse depuis longtemps probablement pour plus longtemps encore, à ce point : il semble impossible d’observer sans avoir un effet sur ce que l’on observe. Autrement dit, l’objective pure serait un non-sens.
Vertigineux, n’est-ce-pas ? 😉
C’est donc aussi en raison des biais de confirmation que certains expliquent qu’un débat politique n’a aucun intérêt, puisque chacune des parties va camper sur ses positions. C’est oublier un peu vite que les observateurs extérieurs, eux, peuvent évoluer en fonction des arguments avancés. Mais ignorer aussi de manière excessive les conséquences à moyen ou long terme de l’exposition à des éléments qui contredisent nos croyances : non, même si vous êtes fermement convaincus d’être dans le Vrai, il reste un espoir de vous rendre compte, un jour, que vous êtes parfois, ne serait-ce qu’un peu, dans l’approximation… ou même l’erreur 😉
Mémoire sélective
Comme invoqué un peu plus haut, la mémoire elle-même a tendance à enfouir ce qui remet en question nos croyances et convictions, et à rendre brillant et bien visible tout ce qui, au contraire, les soutiennent.
Plusieurs études ont ainsi montré que notre mémoire est plus efficace (toujours cette notion d'”efficacité”, bien plus que de “performance”) lorsque les souvenirs nous sont… agréables, en fait. Logique, non ? 😉
Et le système s’auto-alimente alors, sachant que ces mêmes souvenirs (souvent des anecdotes…) nous servent de socle pour donner plus de poids à nos intimes convictions. Le biais de confirmation se nourrit donc de cette mémoire sélective.
Biais de confirmation et douance
Les adultes surdoués peuvent être particulièrement concernés par le biais de confirmation en raison de certaines caractéristiques associées au Haut Potentiel.
Consulter un psychologue spécialisé Haut Potentiel peut être une des clés pour reprendre le contrôle.
Haut niveau de compétence cognitive et grande capacité d’analyse
Sans surprise, l’adulte surdoué est, toute chose étant égale par ailleurs, très compétent en matière d’apprentissage. Il sait mieux que quiconque où chercher des informations, les confronter, les compiler, les comprendre, les analyser…
Revers de la médaille : ce “super pouvoir” peut aussi précipiter leur radicalisation sur à peu près n’importe quel sujet, si par malheur ils cèdent à cette tentation (largement inconsciente, rappelons-le) de partir en quête d’informations qui vont confirmer leurs croyances préétablies. Et comme celles-ci peuvent trouver leur racine dans l’enfance ou l’adolescence, ou encore dans une découverte trop soudaine ou violente émotionnellement parlant pour être traitée de manière saine et rationnelle (le classique “j’ai découvert un complot, c’est donc que tout n’est pas vrai, donc tout est susceptible d’être complot, donc je vais chercher des informations pour mettre à jour tous ces complots”…. et le surdoué étant souvent doublé d’un justicier, le stade suivant peut rapidement devenir “je me dois d’alerter le monde pour ouvrir les yeux de mes congénères qui ont été trompés et n’y ont vu que du feu”).
Impression de décalage du surdoué
Ce décalage est souvent décrit par les surdoués. Il repose aussi bien sur une grande intelligence que sur des traits de caractères ou des centres d’intérêts et hobbies peu classiques, voire complètement atypiques (parfois le surdoué se découvre une obsession, parfois, à l’inverse, il va se découvrir une nouvelle passion chaque jour qui passe… 🙂 ).
L’adulte Haut Potentiel est souvent tenté de s’imaginer disposer d’une grille de lecture unique, voire “révolutionnaire” et, grisé par cette impression de sens et de mission, peut s’enfoncer rapidement dans le mol oreiller du biais de confirmation.
Excès de confiance en soi
Corolaire du précédent point, le surdoué peut développer, peu à peu ou soudainement, une confiance en soi qui devient excessive. Par exemple, ces surdoués qui font 100% confiance à leur intuition, au motif qu’elle ne leur aurait jamais fait défaut – ce qui est, en soit, déjà un biais de confirmation ! Et qui en oublient donc les précautions les plus élémentaires : une intuition se valide ou s’invalide, elle ne se suffit jamais à elle-même.
En cas de fort égo, le zèbre adulte peut s’enfermer derrière des murailles (“je sais, pourquoi perdre du temps et surtout de l’énergie avec tous ces idiots ignorants qui grouillent dans les douves, en dehors de mon château ?”).
La méfiance est toujours pour moi une des formes de l’intelligence. La confiance une des formes de la bêtise.
Paul Léautaud
(retrouvez d’autres citations sur l’intelligence)
Outre l’égo, l’environnement dans lequel le surdoué a évoluer, mais aussi ses traits de caractère, interviennent bien entendu directement dans la probabilité qu’a celui-ci d’être fragile face au biais de confirmation. Par exemple, un surdoué qui a été élevé par des parents eux-mêmes fortement exposés à ce biais aura probablement moins de chance de développer des anticorps qu’un autre éduqué dans un un milieu à l’esprit critique plus affuté.
Car le meilleur moyen de se protéger des effets pervers du biais de confirmation reste d’entretenir tout à la fois son ouverture d’esprit et sa pensée critique. A minima, cela passe par la conscience des différents biais cognitifs, et l’acceptation du fait que, tout surdoué que l’on soit, on n’est pas à l’abri de ceux-ci. Et que l’on peut même parfois, paradoxalement, y être plus exposé. Pas facile à encaisser pour l’amour-propre ! Et comment s’en tenir à ça même s’il est depuis longtemps admis désormais que “douance” n’est pas forcément synonyme de “supériorité intellectuelle”, en tout cas pas de manière totale et globale.
En fait, le salut se trouve dans l’hygiène mentale quotidienne. Le sens de l’effort, pas toujours présent de façon naturelle chez les surdoués en raison d’une scolarité survolée, par exemple, en est une brique essentielle. De l’effort, et du courage : car il s’agit de s’exposer volontairement à des démonstrations solides mais susceptibles de faire s’écrouler des certitudes. Tout en admettant que tout le monde, absolument tout le monde, est victime d’idées reçues, de préjugés et autres stéréotypes (l’essentiel étant, précisément, de commencer par l’accepter pour pouvoir s’améliorer).
Attention, ça va tanguer ! Mais la prise de décision éclairées est à ce prix.
Bref : rencontrer des surdoués, c’est biais. Rencontre des surdoués qui ne pensent pas forcément comme nous, c’est mieux 🙂
N’hésitez donc pas à lancer une Discussion au sein d’un des Groupes du site (le Groupe “Politique”, par exemple, même s’il vaut mieux peut-être commencer par quelque chose de moins ardu 😉 ).
En savoir plus :
Biais de confirmation (Wikipedia)