Tout savoir sur le biais d’attribution
Le biais d’attribution, ou biais d’attribution causale, ou encore biais fondamental d’attribution, est un biais cognitif qui fait moins souvent la une des journaux que le biais de confirmation, l’effet Dunning-Kruger ou même l’effet Barnum – ce dernier étant surtout populaire dans les publications qui ciblent les Haut Potentiel Emotionnel (HPE) et les Haut Potentiel Intellectuel (HPI).
Qu’est-ce que le biais d’attribution ? Définition
Avez-vous remarqué la tendance qu’ont certaines personnes à expliquer tout via des facteurs causals externes (circonstances, situations…) ? Par exemple, si une personne issue d’une minorité ne trouve pas de travail c’est nécessairement parce qu’elle est victime de discrimination à l’embauche ? Ou si un pays communiste fait face à une situation économique et sociale désastreuse, c’est forcément à cause des Etats-Unis ?
A l’inverse, d’autres ramènent tout à des facteurs internes, tels que les traits de personnalité et les caractéristiques personnelles. Si leur voisin est en arrêt maladie de longue durée, c’est forcément parce qu’il est paresseux ou hypocondriaque. Si un SDF vit depuis des années dans la rue, c’est toujours car il en a décidé ainsi.
Dans les deux cas, un biais d’attribution est à l’oeuvre. Mais on ne peut réellement parler de biais que si la propension à favoriser des facteurs externes ou des facteurs internes est systématique – ou en tout cas largement dominante – et que l’on est incapable de tenir compte de toutes les données disponibles.
Il existe deux types principaux de biais d’attribution.
Biais d’attribution fondamentale
Ce biais intervient lorsqu’un individu privilégie fortement l’interne à l’externe. Ainsi, si votre neveu échoue à un examen, vous allez en conclure qu’il est paresseux… Et/ou pas très intelligent. Tout en étant incapable de prendre en compte d’autres éléments situationnels (par exemple, une rupture amoureuse la veille du partiel), ou en tout cas en ne leur accordant pas suffisamment de poids par rapport à la réalité.
Biais d’attribution situationnelle
Ici, c’est l’inverse : la réussite à l’examen sera expliquée uniquement comme étant le résultat d’un concours de circonstances (par exemple, “ils ont donné le diplôme à tout le monde cette année”), ou de privilèges (“c’est un fils de prof”), en écartant le travail, les efforts, l’intelligence, et toutes les autres caractéristiques personnelles qui ont contribué au succès en question.
Quelles sont les conséquences du biais d’attribution ?
Comme beaucoup d’autres biais cognitifs, le biais d’attribution est une fabrique à préjugés et stéréotypes. Il alimente ainsi le ressentiment, la jalousie, et des phénomènes tels que le racisme, le sexisme et, plus généralement, de tout ce qui est différent.
En effet, il brouille notre capacité à comprendre autrui, et il peut nous amener à apposer les mêmes étiquettes systématiquement, par simple pensée automatique, pour rester dans notre zone de confort, sur des personnes ou des situations parfois bien différentes. Qui n’a jamais été tenté de penser que “les riches” sont ceci ou “les femmes” sont cela ?
C’est ici l’occasion de rappeler que, pour vivre heureux, peut-être est-il préférable d’accepter que le monde ne nous doit rien…
Ce biais peut aussi faciliter le développement d’un syndrome de l’imposteur, puisqu’ici l’individu attribuera sans cesse tout ce qu’il pourra accomplir à des causes externes (la chance, le hasard, l’abandon d’un concurrent qui était “objectivement meilleur” :), …).
Quelle est la différence entre biais d’attribution négative et paranoïa ?
On parle de “biais d’attribution négative” quand nous avons tendance à attribuer les événements négatifs à des facteurs internes, stables, tels que les trais de personnalité, en oubliant d’éventuels facteurs situationnels (externes).
Exemple concret : vous vous rendez dans une soirée, et une personne que vous connaissez vous ignore superbement. Vous pouvez en conclure hâtivement que celle-ci ne vous aime pas, vous méprise, a honte de vous connaître, ou encore que cela n’a rien de personnel mais qu’elle est tout simplement, fondamentalement, hautaine. Alors que d’autres possibilités existent… A commencer par les plus simples. Comme le fait qu’il se soit passé quelque chose dans la vie de cette personne, ce jour-là, dont vous n’avez pas connaissance.
Toujours éviter de juger trop rapidement…
La paranoïa, c’est tout de même autre chose… On est ici dans un trouble psychologique. Le paranoïaque tend à voir le monde comme une menace dirigée contre lui. Selon le degré de paranoïa, cela peut aller d’un “simple” sentiment, un peu trop systématique, que “quelqu’un nous en veut”, à des idées délirantes, qui persistent même en l’absence de preuve concrète.
Si le biais d’attribution négative peut nourrir la paranoïa, celle-ci va donc bien plus loin, puisqu’elle suppose une distorsion cognitive bien plus intense, qui s’exprime parfois sous forme de bouffées délirantes. Bien entendu, les théories du complot sont très séduisantes pour un paranoïaque, puisqu’elles tendant à valider les croyances du sujet, tout en lui faisant rencontrer des individus qui partagent les mêmes distorsions (avec un fort risque, naturellement, d’enfermement rapide dans une bulle cognitive).
Biais d’attribution et douance
Et si les Haut Potentiel étaient prédisposés à être touchés plus fortement que la moyenne par le biais d’attribution ? Bien entendu, aucune étude n’est venue à ce jour s’intéresser à ce sujet – et il y a fort à parier que cela ne changera pas de si tôt 🙂 Nous nous contenterons donc, ici de poser quelques hypothèses.
Sensibilité accrue
Parmi les caractéristiques du zèbre, l’hypersensibilité est souvent citée (même si ce point lui-même continue de faire débat).
Cette capacité à percevoir plus de détails pourrait renforcer un éventuel biais d’attribution, puisque le surdoué se sentirait alors conforté dans ses croyances à travers la quantité d’informations perçues et analysées.
Ce qui pourrait aussi amener un HP à voir, parfois, une causalité qui n’existe tout simplement pas. Hé oui, il est apparemment possible de “trop penser”…
Dans le domaine de l’intelligence, la vertu d’humilité n’est pas autre chose que le pouvoir d’attention.
Simone Weil
(voir d’autres citations sur l’intelligence)
Expériences de décalage
Si le surdoué se sent souvent en décalage par rapport au monde qui l’entoure, il peut aussi ressentir un décalage entre son niveau de développement intellectuel et son développement social ou émotionnel.
Ne sachant pas toujours décoder correctement les interactions sociales, il peut facilement commettre des erreurs d’attribution – ce qui peut parfois le conduire à développer un Faux Self.
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