Sunk Cost Fallacy

  • Sunk Cost Fallacy

    Publié par olbius le 28 août 2020 à 16 h 34 min

    Connaissez-vous le Sunk Cost Fallacy ? Il s’agit d’un biais cognitif lié à l’aversion à la perte.

    Qu’est-ce que c’est, le Sunk Cost Fallacy ? Il faut d’abord s’attacher à la définition des coûts irrécupérables :

    En économie comportementale et dans l’analyse de la décision, les coûts irrécupérables (sunk cost en anglais) sont les coûts qui ont déjà été payés définitivement ; ils ne sont ni remboursables, ni récupérables par un autre moyen.

    Maintenant, nous pouvons définir “Sunk Cost Fallacy” :

    Pour un agent rationnel, [les] coûts [irrécupérables] ne devraient pas peser dans la balance pour les choix qui sont réalisés après qu’ils ont été engagés.
    En pratique cependant, ils interviennent souvent dans le raisonnement, du fait de l’aversion à la perte. On désigne en anglais ce biais par le terme de sunk cost fallacy.
    Par exemple, un spectateur dans une salle de cinéma qui trouve le film très mauvais et s’ennuie hésitera souvent à quitter la salle avant la fin du film, pour ne pas gâcher l’argent qu’il a dépensé pour son billet. Mais si un ami lui a donné un billet gratuitement parce qu’il ne pouvait pas se rendre à la séance, le même spectateur n’hésitera alors généralement pas à partir.

    Source (Wikipedia) : Sunk Cost Fallacy et Coût irrécupérable (attention au dernier paragraphe de la section “Irrationalité dans leur prise en compte”, extrêmement discutable (pour rester poli 😉 ))

    Pour les anglophones, je vous conseille plutôt la page Wikipedia en anglais, bien plus juste et complète : Sunk cost

    Le Sunk Cost Fallacy est souvent à l’oeuvre lorsque vous entendez des personnes dire “les problèmes que nous rencontrons sont dus au manque de moyens”. Toujours plus d’argent sera ainsi jeté au fond du trou, phénomène qui ira en s’amplifiant de manière exponentielle avec le temps, étant donné que les coûts irrécupérables n’auront cessé de croître. Et le tunnel de réflexion deviendra de plus en plus étroit : il sera de plus en plus difficile d’envisager une autre réponse que “manque de moyens” à tout problème rencontré.

    L’effondrement systématique des pays communistes à plus ou moins long terme est certainement en partie – les causes sont multiples – dus à ce phénomène de Sunk Cost Fallacy, étant donné qu’aucun mécanisme correcteur, à commencer par le marché, c’est-à-dire les gens, le monde réel en somme, n’entre en action.

    C’est aussi en raison du Sunk Cost Fallacy que l’on voit rarement un survivaliste ou quelqu’un qui veut construire une fusée dans son jardin, par exemple, abandonner ses projets : à mesure que les coûts irrécupérables augmentent, l’individu s’enfermera, via un phénomène de post-rationnalisation, dans ses certitudes.

    Autrement dit, il ne s’agit pas forcément de personnes farfelues, ou éveillées d’ailleurs. Il s’agit de personnes qui sont allés trop loin pour faire marche arrière, qui “n’ont plus assez d’essence pour faire la route dans l’autre sens”, comme disait Alain S. (Alain Souchon, pas Alain Soral hein 😉 ).

    Le Sunk Cost Fallacy est déjà gênant lorsqu’il s’agit d’un individu. Ça l’est beaucoup plus lorsqu’il s’agit d’un groupe d’individus avec beaucoup de pouvoir, qui prennent des décisions pour un grand groupe d’individus.

    Wikipedia donne à ce sujet l’exemple du Concorde, mais il y a des exemples du même genre tout autour de vous, à tous les niveaux :

    « The Concorde fallacy » ou « l’erreur de jugement du Concorde »1 fait référence à l’entêtement des gouvernements français et britannique à poursuivre ce projet, pour des raisons politiques et de prestige mais aussi parce que des dépenses considérables avaient été engagées, alors que l’exploitation commerciale non rentable du Concorde était actée dès 1973.

    La culture économique en France étant malheureusement… disons, “ce qu’elle est”, il n’y a pas de traduction à “Sunk Cost Fallacy”…

    Néanmoins, je trouve l’expression “sophisme du Concorde” (ou, plus généralement, “sophisme des coûts irrécupérables”) très pertinente. Il est d’ailleurs question du “Concorde fallacy” sur le Wikipedia anglais.

    Et vous, avez-vous été victime du Sunk Cost Fallacy ? Cela s’est traduit comment ?

    hanae a répondu il y a 3 années, 10 mois 4 Membres · 5 Réponses
  • 5 Réponses
  • pulsar

    Membre
    28 août 2020 à 22 h 39 min

    La culture économique en France étant malheureusement… disons, “ce qu’elle est”, il n’y a pas de traduction à “Sunk Cost Fallacy”…

    Il me semble qu’en français on appelle ça le biais de la somme perdue.

    Faut que je check ça dans le Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens de Joule & Beauvois. Mais là, tout de suite, je peux pas : je l’ai prêté à ma sœur… Qui ne l’a toujours pas lu ! Triumph

  • olbius

    Organisateur
    28 août 2020 à 22 h 50 min

    Merci pour l’info, je pensais qu’ils n’avaient pas vraiment proposé de traduction faisant l’affaire ☺️

    Je viens de tomber par hasard sur un article du Figaro qui aborde également ces notions : Doit-on persister coûte que coûte ?

    Article réservé aux abonnés malheureusement, seul le début est en accès libre.

  • olbius

    Organisateur
    1 septembre 2020 à 8 h 41 min

    J’utilise souvent des anecdotes de ce type pour expliquer des concepts aux étudiants, je te pique la tienne du coup 😁

  • Membre Inconnu

    Membre
    1 septembre 2020 à 11 h 42 min

    Voilà un sujet intéressant. Qui est, en réalité, une sous classe des théories de l’engagement. Intéressant car il implique bien des sous éléments qui peuvent, si on en a conscience, sauver la mise dans bien des situations de la vie de tous les jours. Se pose la question : comment ne pas se faire piéger ? Ou “comment se désengager” ? Développer un sens du sacrifice, ou accepter effectivement ces pertes irrécupérables, sont des ressorts parmi d’autres.

  • hanae

    Membre
    1 septembre 2020 à 11 h 49 min

    Ça me fait penser à ce qui peut se passer quand on a une estime de soi très haute mais instable.

    Le choix qui est pris au départ est peut être pas suffisamment réfléchi alors que l’on pense tout détenir et les décisions qui suivent ne font qu’aggraver les choses, arrive le moment où on ne peut plus revenir en arrière et où on va droit dans le mur quoi qu’il en soit.

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