Avoir de l’humour noir est[-t-il] un signe de haute intelligence [?]

  • Membre Inconnu

    Membre
    6 novembre 2019 à 12 h 11 min

    Salutations @momosse !

    Il y avait beaucoup de dérision et d’auto-dérision dans mon dernier message. Je ne prends pas cela trop au sérieux. Quand l’humour pose problème, j’ai constaté que c’était toujours un prétexte, et que le véritable problème était ailleurs…

    C’est toujours plus facile de dire à quelqu’un que son humour nous déplaît, plutôt que de lui dire en face que c’est lui, en réalité, qui nous incommode lol C’est souvent très passif-agressif comme attitude. “Soupçon de fiel enrobé de vaseline”, ObSeSSioN, parfum pour hommes ahahah

    Maintenant, pour ce qui est de l’étude publiée, ce n’est pas très rigoureux. En matière de méthodologie, voilà comment j’aurais procédé…

    ——-

    Etape 1. Définir son objet d’étude, puis l’analyser.

    On n’étudie pas un objet (au sens phénoménologique) ou un phénomène, sans le définir au préalable. Ecrire que l’humour noir porte sur des sujets comme la mort, le suicide, etc. ; ce n’est pas une définition rigoureuse.

    En logique, il y a deux façons de définir un concept. Soit par extension, soit par compréhension (ou intension). Si la définition par extension est parfaite pour un dictionnaire, elle ne l’est pas du tout dans le cadre d’une recherche scientifique.

    A quoi se réfèrent la mort, la tristesse, le suicide, etc. ? Quel est leur point commun dans le cadre qui nous intéresse ici ? Ils font tous référence aux passions tristes (dans le langage de Spinoza). C’est-à-dire des sentiments “négatifs”.

    Qu’est-ce que l’humour ? Un trait de l’esprit suscitant le rire, c’est-à-dire un sentiment de joie, quelque chose donc de “positif”. Là, nous pouvons opérer un raisonnement modus ponens, et avancer une première définition de ce que serait l’humour noir : un trait de l’esprit suscitant le rire, tout en portant sur des affects “négatifs”.

    Il y a donc une contradiction qu’il faut analyser. Comment cet humour passe-t-il de la tristesse à la joie ? Quelle est sa mécanique ? Il recourt à la caricature et à l’absurde. Cela porte un nom en logique ou en mathématiques : c’est le raisonnement par l’absurde. En quoi consiste-t-il ?

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Raisonnement_par_l%27absurde

    Donc ? L’humour noir se base sur des affects négatifs qu’il considère dans un premier temps comme vrai, ce qui donne une certaine tension, qu’il va désamorcer grâce à l’absurde, d’où le rire (on relâche la tension). Le procédé est donc relativement cathartique. Cela fait un peu technique de présenter les choses ainsi, mais ça évite de tomber dans les jugements de valeur.

    Nous avons donc une définition sur un objet, quels sont ses implications logiques ? Si le coeur de la mécanique de cet humour repose sur un raisonnement logique, impliquant l’absurde et la caricature ; alors son efficacité est tributaire de la capacité du récepteur à avoir un certain sens logique, et à reconnaître cet absurde.

    D’où le raisonnement par contraposée suivant : quiconque n’ayant pas une certaine logique et/ou la capacité de reconnaître ce qui est absurde, ne sera pas sensible à un humour noir. De se poser la question suivante – principe de causalité – pourquoi ?

    Si la personne n’a pas un fonctionnement logique à la base, c’est peut-être parce qu’elle est trop jeune, qu’elle souffre d’handicap, qu’elle a une intelligence limitée, etc. Ce qui explique pourquoi elle ne reconnaît pas ce qui relève de la caricature dans certaines situations. Si elle ne distingue pas une norme de sa caricature, cela signifie que sa vision du réel est caricaturale. Cela implique une pensée sans nuance, sans relief.

    Bon, ce que je viens de faire très grossièrement, c’est ce que nous appelons une analyse conceptuelle. C’est la base en philosophie, en épistémologie, et normalement en sciences. Définir, analyser, démontrer.

    Nous avons donc démontré que l’humour noir impliquait une certaine “intelligence”. Mais cela est juste la première étape. Cela ne suffit pas à comprendre ce que ça signifie concrètement dans le réel. C’est-à-dire qu’il faut maintenant confronter notre pensée, aux faits.

    ——-

    Etape 2. Se confronter au réel.

    Si nous avons démontré que l’humour noir impliquait une certaine intelligence, alors quelle est la méthode la plus efficace pour tester empiriquement cette idée ? D’un point de vue logique et mathématique, s’amuser à tester l’humour de tous ceux qui auraient un QI élevé, est sans doute la démarche la plus conne.

    Si quelqu’un affirme que les moutons sont les seuls animaux qui peuvent produire de la laine. Est-ce que vous allez vérifier l’ensemble des moutons existant pour savoir si c’est vrai ? Bah non. La solution la plus simple est de trouver un seul animal, qui ne soit pas un mouton, et qui peut produire de la laine ! Et cela porte le joli nom de démonstration par contre-exemple !

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Contre-exemple#N%C3%A9gation_d'une_g%C3%A9n%C3%A9ralit%C3%A9

    En l’occurrence, si la notion d’intelligence est toujours très controversée, car cela chatouille un peu trop notre amour propre, nous n’avons aucune difficulté à reconnaître, d’un point de vue médical, les handicaps ou les déficits. C’est une façon de contourner le problème. Il peut donc tout simplement s’agir d’enfants de 5 ou 6 ans, dont l’intelligence n’est pas encore développée. Et s’il s’avère qu’ils sont sensibles à l’humour noir, nous invalidons par les faits notre démonstration.

    Donc. Est-ce qu’un enfant de 5 ou 6 ans rigolera de bon coeur de sujets comme la mort, le suicide, etc. ? Ou est-ce qu’une personne qui souffre d’un retard intellectuel, sera sensible à ce genre d’humour ? Les faits démontrent que non. Mais cela ne suffit pas, il faut comprendre *pourquoi* il en est ainsi. Cela nous évitera de tester tous les enfants de 5 ou 6 ans. En l’occurrence, la littérature scientifique consacrée au développement de l’enfant et du cerveau ne manque pas. L’humour est intrinsèquement lié à certains processus cognitifs. Et là, ce sera beaucoup plus facile et efficace d’avancer dans notre recherche.

    ——-

    Etape 3. Tester les limites de notre raisonnement

    Là, il conviendra de prendre du recul et d’éviter un biais qui nous pend au nez, à savoir le sophisme du faux-dilemme. Autrement dit, est-ce que ceux qui ne sont pas sensibles à l’humour noir sont nécessairement “idiots” ? Est-ce qu’il ne pourrait pas y avoir d’autres facteurs, indépendamment de l’intelligence, qui pourraient impacter notre sens de l’humour ? C’est tout à fait possible, et il ne faut surtout pas le négliger !

    Et la réponse est oui. Un état dépressif aura un impact considérable sur notre capacité à rire de certaines choses. Si quelqu’un vient de perdre sa femme, je doute qu’une blague un peu noire le fasse marrer. Cela ne signifie pas que c’est un idiot, pas plus que ça signifie que celui qui a fait la blague, est un idiot. Il y a aussi les cas des aspergers qui ne reconnaissent pas l’ironie ou le second degré, et certains sont très loin d’être idiots…

    Autrement dit, le réel est complexe et subtil. Notre pensée se doit d’être nuancée par les faits et les cas de figure. Et à mon sens, une étude scientifique est intéressante lorsqu’elle invalide un concept (comme le concept d’inconscient qui a été invalidé par les neurosciences), ou qu’elle nous apporte un enrichissement dans notre compréhension du réel. Si c’est pour enfoncer des portes ouvertes, affirmer des choses sans aucune nuance, ce qui est tout de même le cas avec l’étude publiée, alors c’est quand même médiocre…

    ——-

    Quid de mon cas particulier, qui ne concerne que moi ? Je pense que si nous peinons à rire de tout, comme ce fut le cas les années passées, c’est très certainement parce qu’il y a un certain mal-être qui s’est peu à peu dilué dans la société. Si vous êtes Noir, que vous avez un salaire de 15000 euros par mois, que vous vivez dans une villa avec piscine, une femme et des enfants magnifiques, vous ne prendrez pas mal une blague douteuse. Cela ne vous touchera pas, car tout va bien dans votre vie. Et vous vous vengerez sûrement en balançant une bonne blague au gars qui a voulu être un peu piquant avec vous.

    Maintenant, si vous vivez dans un petit appartement, dans un quartier où il y a parfois de la violence, avec des problèmes financiers et existentiels, que vous avez peur pour votre avenir ainsi que celui de vos enfants, et qu’en plus un connard vous sort une blague de merde, là vous allez péter une durite. C’est juste évident. Mais comme je l’écrivais au début de ce grooos pavé, un humour qui pose problème est un prétexte, car le gros du problème est toujours ailleurs. Et du haut de mon balcon, à l’orée de mes expériences personnelles, j’ai souvent constaté que ceux qui avaient un tempérament dépressif, étaient plus enclin à me péter une durite à la suite d’une blague de mauvais goût.

    Est-ce qu’il faut pour autant se renier, mettre en veilleuse sa joie de vie, son envie de faire marrer des personnes qui n’ont pas de problèmes particuliers, etc. ? Je pense qu’on attire les gens qui nous ressemblent, et qu’il y a un phénomène répulsif avec ceux qui ne nous correspondent pas. L’humour reste à mes yeux un bon moyen de faire le tri. Et tant pis si ça doit exclure 99% de la population ^^ Je n’ai aucun problème avec le fait qu’on puisse ne pas m’aimer, ou qu’on me trouve chiant ou antipathique ou lourd ou normopensant ou beauf ou je ne sais quoi. Ce n’est pas trop mon problème. Être aimé ou apprécié par une seule personne, pourvu que cela soit sincère, cela me suffit amplement ! 😉

    PS : tu as parfaitement raison, le fait de ne pas connaître son interlocuteur n’aide pas toujours à deviner le ton qu’il y a derrière ses écrits… C’est pour cela que j’abuse parfois des smileys, mais je me rends compte que cela ne suffit pas toujours ^^

  • alicepp

    Membre
    6 novembre 2019 à 13 h 53 min

    Bin c’est pas tant qu’on puisse en tirer qqc, ou que cette étude puisse prétendre être autre chose qu’une analyse exploratoire, mais j’ai été surprise de son sérieux vis à vis des articles médiatiques et des réactions ici.

    Ok, ça ne répond pas formellement à une question, c’est pas hyper intéressant, mais vis à vis de leurs objectifs, j’ai trouvé leurs materiel et méthodes honnêtes, et les résultats sont soutenus, et pas trop extrapolés (dans l’étude!). Ils n’apportent que de l’eau à des moulins anciens, mais selon eux leurs résultats soutiennent les hypothèses selon lesquelles des composantes cognitives et affectives ont un rôle dans le processus humoristique. Point (.). 🙂

    C’est de toutes façons aussi peu douteux que peut être une étude basée sur des impressions et des interprétations, un questionnaire …

    <span style=”line-height: 1.5;”>Je n’ai pas été choquée par le panel (moitié celib/marié, h/f …), même si je comprends ce que tu dis, surtout sur l’aspect religieux (c’est bizarre qu’ils aient juste évacué la question comme ça!). Sur la vieillesse et la proximité avec la mort, il y a 10℅ de veufs je crois. Bon, je pense quand même que tu as raison, l’échantillon n’es pas très représentatif de la population globale.</span>

    Je pense pas non plus que cette étude réponde à tes questions, sur ce qui est universel dans le rire.

    Au demeurant, ça ne dit rien de ce que je pense de l’humour 🙂

    J’adore quand l’humour transforme une expérience pour la rendre plus poétique, plus absurde, plus légère, plus colorée. C’est une bonne manière aussi d’exprimer la tristesse, l’indignation. Ça casse la monotonie du réel.

    C’est tellement rare que quelqu’un me fasse rire (dans des situations oui, mais ce n’est pas réellement leur humour) que quand c’est le cas, je me sens automatiquement plus proche et plus connectée à l’interlocuteur donné.

    Bon, après, le fait que peu de monde me fasse rire s’explique peut-être par mon instabilité émotionnelle, dixit la fameuuuuse étude 😉

  • Membre Inconnu

    Membre
    6 novembre 2019 à 14 h 04 min

    @darren

    Je n’ai pas un esprit scientifique mais je pense être un analyste de “l’empirique non-comptabilisable mathématiquement” plutôt fréquentable… Voir présentable même ^^

    Je sais que je peux faire rire (volontairement (^^)) certains proches ou quelques fréquentations par mon ironie, mes sarcasmes ou dans ma façon de m’exprimer par mimiques. En cela, je peux affirmer que j’ai un certains sens de l’humour.

    Si je peux ne pas toujours entendre d’emblée les décalages a visées humoristiques d’un autre, je les conçois bien dès-lors que j’ai assimilé la démarche “mécanoricanante” de cet autre (sans forcément y trouver de la drôlerie). Néanmoins, comme je suis, c’est-à-dire à préférer éviter les groupes plutôt qu’à les rejoindre et n’ayant (qui plus-est) aucune prédisposition pour l’établissement de rapports amicaux (suivis ou pas), je n’ai pas souvent l’occasion de faire profiter quiconque de cette aptitude remarquable qui est mienne et ceux qui peuvent en témoigner se limitent aux membres de mon cercle familial restreint et à (toutes !) celles que j’ai connu “en vrai” (ce qui multiplie par un truc comme 5 le nombre de “mes fans” (avoués ou refoulés))… Nan parce-que le sort ne m’a quand même pas handicapé à ce point socialement pour m’empêcher (en plus) de me passer d’accompagnatrices complaisantes ou pas (rarement aptes à comprendre mon être mais tout de même souvent ouverte à recevoir une part de lui en elles).

    Ceci écrit avec vérité et sens, nonobstant l’aspect déconne de cela.

  • Membre Inconnu

    Membre
    6 novembre 2019 à 20 h 48 min

    Putain ! J’avais pas réalisé qu’il s’agissait d’un cleps sur la photo ! Je ne distinguais qu’une masse floue et mon cerveau n’en avait rien traduit.

    Alice est beaucoup plus mimi que son compagnon velu (qui doit être une femelle). Perso’, pour une photo de profil, je ne voudrais pas qu’un tiers (canin ou autre) empiète sur ma face mais bon, “moi c’est moi” quoi…

    Enfant, on avait des chats à la maison (à l’unité et qui se succédaient à mesure qu’ils épuisaient leur sept (ou neuf ?) vies). Adulte, j’ai eu des enfants à la place ^^

    Le seul de ces félins qui m’a laissé un souvenir était un spécimen assez quelconque mais une peu plus grand que la moyenne et à la livrée noire avec quelques touches de blanc (sur une ou deux pattes, son ventre et sa tête (le museau il me semble)) dont je ne me rappelle plus du nom. Il avait un comportement très dominant avec tous ses congénères mâles (en qui il voyait des concurrents) sur qui il imposait sa loi par la force et couvrait (dès qu’il pouvait) toutes les femelles de son espèce alentours. Encore moins proche de ceux qui le nourrissait que les autres bâtards qu’on a hébergé avant ou après lui, il ne venait le plus souvent que pour manger et s’éternisait rarement au-delà de la durée d’une sieste à la maison, comme il n’acceptait qu’à dose homéopathique nos caresses et manifestait à coup de griffe ou de morsures qu’il en avait (vite !) assez ^^… Il devait avoir accordé à ma mère un statut équivalent au sien en constatant que c’était elle qui le nourrissait et en ce que je pense qu’il avait identifié qu’elle était elle-même la maîtresse au sein de notre maisonnée, traduisant cela par une tolérance visiblement accrue avec les démonstrations d’affections qui provenaient d’elle. C’est aussi ma génitrice qui avait constaté sa mort en le voyant écrasé sur la route nationale située en contre-bas de chez nous et son annonce produit que (pour la seule fois de ma vie) j’ai écrasé des larmes pour une bête. Je devais avoir autour des 8/9 ans et lui a du nous accompagné environ 3 ans tout au plus.

  • Membre Inconnu

    Membre
    13 novembre 2019 à 19 h 50 min

    Salutations !

    Désolé pour le retour un peu tardif… 🙂

    @momosse a écrit :

    Je n’ai pas un esprit scientifique mais je pense être un analyste de “l’empirique non-comptabilisable mathématiquement” plutôt fréquentable… Voir présentable même ^^

    C’est tout le mal que je te souhaite ! ^^

    Nan parce-que le sort ne m’a quand même pas handicapé à ce point socialement pour m’empêcher (en plus) de me passer d’accompagnatrices complaisantes ou pas (rarement aptes à comprendre mon être mais tout de même souvent ouverte à recevoir une part de lui en elles).

    Oh… Généralement, avoir de l’humour est toujours un bon point 🙂

  • Membre Inconnu

    Membre
    20 novembre 2019 à 23 h 04 min

    Salutations !

    Désolé pour le retour un peu tardif… 🙂

    @momosse a écrit :

    Je n’ai pas un esprit scientifique mais je pense être un analyste de “l’empirique non-comptabilisable mathématiquement” plutôt fréquentable… Voir présentable même ^^

    C’est tout le mal que je te souhaite ! ^^

    Nan parce-que le sort ne m’a quand même pas handicapé à ce point socialement pour m’empêcher (en plus) de me passer d’accompagnatrices complaisantes ou pas (rarement aptes à comprendre mon être mais tout de même souvent ouverte à recevoir une part de lui en elles).

    Oh… Généralement, avoir de l’humour est toujours un bon point 🙂

    @alicepp a écrit :

    Bin c’est pas tant qu’on puisse en tirer qqc, ou que cette étude puisse prétendre être autre chose qu’une analyse exploratoire, mais j’ai été surprise de son sérieux vis à vis des articles médiatiques et des réactions ici.

    En ce qui me concerne, je ne l’ai pas prise au sérieuse, cette étude…
    Et à mon sens, c’est bien là que réside le problème…

    Nous sommes dans le domaine des sciences, il devrait donc y avoir une certaine rigueur. Cela commence déjà par définir notre objet d’étude, amorcer une analyse conceptuelle pour savoir où l’on va. Sinon, cela revient à se borner aux mêmes acceptations de sens que ceux du sens commun. Avec des contradictions à la clé, puisque ce qui forge le sens commun ou une doxa, c’est juste une somme d’opinions. En quoi cela est-ce donc sérieux ? Faire une étude sur la base d’une opinion, même si elle est partagée par le plus grand nombre, en quoi cela est-ce scientifique ?

    ——-

    Je me souviens, par exemple, d’une étude réalisée dans le cadre des neurosciences, pour savoir si nous avions bel et bien un libre-arbitre. On passait donc différentes images aux sujets, on leur demandait d’en choisir une assez rapidement, et pendant ce temps-là, on regardait ce qu’il se passait au niveau du cerveau. Pas une seule fois ces chercheurs se sont dits que ça pouvait être intéressant de définir ce qu’ils entendaient par “libre-arbitre”. Alors que c’est précisément cela qu’ils étudiaient !

    Ils se sont dits “naturellement” que la notion de libre-arbitre était liée à notre capacité de faire des choix, soit une conception religieuse et/ou métaphysique qui fut critiquée par Spinoza dès le XVIIe. Mais cela n’a rien d’étonnant : c’était des chercheurs anglo-saxons, ils ont hérité d’une représentation du monde basée sur une culture judéo-chrétienne, qui porte donc en son sein tout un tas d’évidences ou d’opinions communes. Sauf que s’en tenir là, ce n’est pas vraiment rationnel. On peut s’interroger légitimement de l’objectivité de cette étude.

    En philosophie, nous savons que la notion de libre-arbitre pose problème, car elle ne cadre pas dans un système déterministe, qui lui-même repose sur le principe de causalité. Cela a donc des conséquences en épistémologie. Comme cela n’a pas été pris en compte – ni étudié, ni analysé – nous ne pouvons que remettre en cause leur interprétation des “faits”. Et pourtant, cela a été relayé dans certains médias, comme si c’était une extraordinaire découverte !

    ——-

    Dans certains milieux zététiques, là où l’on se donne comme mission de faire la promotion de la bonne méthode scientifique, nous observons que beaucoup raisonnent dans un cadre mécaniste ou matérialiste. D’ailleurs, très peu font la distinction entre “rationnel” et “matérialiste”, et lorsqu’ils abordent la question de la vérité, ils ont souvent une posture dogmatique, ce qui est contradictoire avec le scepticisme. Ce courant philosophique est né dans la Grèce antique en réaction au dogmatisme, donc bon…

    Mais ce manque de culture philosophique est manifeste dès lors qu’ils se mettent à discourir sur le cerveau, aidés en cela d’études psychologiques ou neuroscientifiques. Ils présentent cela comme si c’était une nouveauté, sauf que cela se savait depuis l’Antiquité. C’est même au coeur de la philosophie de Platon ! Et après Platon, il y a eu plus de 2000 ans d’Histoire de la pensée… C’est dire le retard que peuvent avoir certains scientifiques sur le plan intellectuel… Les expériences et la technique, ça ne fait pas tout…

    Alors okay pour dire que nous comprenons mieux les mécanismes de notre cerveau, mais sur le terrain philosophique, nous ne sommes pas plus avancés… Certains expliquent même que si nos perceptions peuvent être biaisées, alors il en est de même pour nos raisonnements ; ce qui nous conduit inéluctablement dans un cercle vicieux auto-contradictoire… Si j’écris que mon cerveau est buggé et que mes raisonnements le sont, comme ce que j’écris est issu d’un raisonnement, alors cela ne peut être que faux… Donc mon raisonnement est juste, ce qui signifie que ce que j’ai écrit est juste, donc mes raisonnements sont bel et bien faux… lol

    Personne ne semble s’être intéressé aux mathématiques, à la logique, toutes ces choses abstraites, qui reposent sur des lois abstraites, et qui ne reposent donc pas sur l’expérience sensible (donc là, on ne risque pas d’être trompé par nos sens). Et ils prétendent ensuite vouloir défendre la bonne méthode scientifique, ça fait quand même peur…

    ——-

    Je suis un peu parti dans ma lancée car c’est un sujet qui me touche, mais fait est que je retrouve tous les biais et travers méthodologiques dans cette étude sur l’humour noir et l’intelligence. Même s’il s’agit d’une recherche exploratoire, cela ne nous exempt pas d’être rigoureux. Il est évident que pour une personne lambda, son niveau d’exigence en terme de rigueur sera peu élevé. Il y aura une certaine complaisance avec les failles, car elle ne verra pas en quoi cela pourra poser problème.

    Par conséquent, si elle devait juger d’un protocole scientifique, quelque chose de peu rigoureux lui apparaîtrait très convenable. Mais ce que je constate avec un certain effroi, c’est qu’il y a beaucoup de scientifiques qui se comportent comme des “personnes lambda”. Un peu comme s’ils avaient été formés à l’arrache ou par des incompétents…

    Et je précise qu’il n’y a rien de personnel dans ce que j’écris. D’autres avant moi ont déjà sonné l’alarme, ce qui a même donné lieu à une publication ! Avouez que ce n’est pas piqué des hannetons ! ^^

    https://www.letemps.ch/sciences/etudes-psychologie-fiables-explique-une-etude

    https://www.liberation.fr/sciences/2015/08/29/selon-une-etude-scientifique-les-etudes-scientifiques-ne-sont-pas-fiables_1371394

    https://science.sciencemag.org/content/349/6251/aac4716

    Après tout, chaque discipline gère sa propre épistémologie, développe ses propres méthodologies, selon leur objet d’étude. Peut-être que l’épistémologie et que les analyses conceptuelles ne sont pas importantes dans le cadre de leurs travaux, pourquoi pas ! Mais quand, factuellement, nous nous apercevons que sur 100 publications officielles, il y en a plus de 60% qui sont bonnes à foutre à la poubelle, parce que personne n’a réussi à reproduire leurs résultats, désolé mais ça craint quand même un peu.

    Ils ne donnent pas vraiment une bonne image de ce qu’est la science.

    Bonne soirée !

  • Membre Inconnu

    Membre
    20 novembre 2019 à 23 h 04 min

    @alicepp a écrit :

    Bin c’est pas tant qu’on puisse en tirer qqc, ou que cette étude puisse prétendre être autre chose qu’une analyse exploratoire, mais j’ai été surprise de son sérieux vis à vis des articles médiatiques et des réactions ici.

    En ce qui me concerne, je ne l’ai pas prise au sérieuse, cette étude…
    Et à mon sens, c’est bien là que réside le problème…

    Nous sommes dans le domaine des sciences, il devrait donc y avoir une certaine rigueur. Cela commence déjà par définir notre objet d’étude, amorcer une analyse conceptuelle pour savoir où l’on va. Sinon, cela revient à se borner aux mêmes acceptations de sens que ceux du sens commun. Avec des contradictions à la clé, puisque ce qui forge le sens commun ou une doxa, c’est juste une somme d’opinions. En quoi cela est-ce donc sérieux ? Faire une étude sur la base d’une opinion, même si elle est partagée par le plus grand nombre, en quoi cela est-ce scientifique ?

    ——-

    Je me souviens, par exemple, d’une étude réalisée dans le cadre des neurosciences, pour savoir si nous avions bel et bien un libre-arbitre. On passait donc différentes images aux sujets, on leur demandait d’en choisir une assez rapidement, et pendant ce temps-là, on regardait ce qu’il se passait au niveau du cerveau. Pas une seule fois ces chercheurs se sont dits que ça pouvait être intéressant de définir ce qu’ils entendaient par “libre-arbitre”. Alors que c’est précisément cela qu’ils étudiaient !

    Ils se sont dits “naturellement” que la notion de libre-arbitre était liée à notre capacité de faire des choix, soit une conception religieuse et/ou métaphysique qui fut critiquée par Spinoza dès le XVIIe. Mais cela n’a rien d’étonnant : c’était des chercheurs anglo-saxons, ils ont hérité d’une représentation du monde basée sur une culture judéo-chrétienne, qui porte donc en son sein tout un tas d’évidences ou d’opinions communes. Sauf que s’en tenir là, ce n’est pas vraiment rationnel. On peut s’interroger légitimement de l’objectivité de cette étude.

    En philosophie, nous savons que la notion de libre-arbitre pose problème, car elle ne cadre pas dans un système déterministe, qui lui-même repose sur le principe de causalité. Cela a donc des conséquences en épistémologie. Comme cela n’a pas été pris en compte – ni étudié, ni analysé – nous ne pouvons que remettre en cause leur interprétation des “faits”. Et pourtant, cela a été relayé dans certains médias, comme si c’était une extraordinaire découverte !

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    Je suis un peu parti dans ma lancée car c’est un sujet qui me touche, mais fait est que je retrouve tous les biais et travers méthodologiques dans cette étude sur l’humour noir et l’intelligence. Même s’il s’agit d’une recherche exploratoire, cela ne nous exempt pas d’être rigoureux. Il est évident que pour une personne lambda, son niveau d’exigence en terme de rigueur sera peu élevé. Il y aura une certaine complaisance avec les failles, car elle ne verra pas en quoi cela pourra poser problème.

    Par conséquent, si elle devait juger d’un protocole scientifique, quelque chose de peu rigoureux lui apparaîtrait très convenable. Mais ce que je constate avec un certain effroi, c’est qu’il y a beaucoup de scientifiques qui se comportent comme des “personnes lambda”. Un peu comme s’ils avaient été formés à l’arrache ou par des incompétents…

    Et je précise qu’il n’y a rien de personnel dans ce que j’écris. D’autres avant moi ont déjà sonné l’alarme, ce qui a même donné lieu à une publication ! Avouez que ce n’est pas piqué des hannetons ! ^^

    https://www.letemps.ch/sciences/etudes-psychologie-fiables-explique-une-etude

    https://www.liberation.fr/sciences/2015/08/29/selon-une-etude-scientifique-les-etudes-scientifiques-ne-sont-pas-fiables_1371394

    https://science.sciencemag.org/content/349/6251/aac4716

    Après tout, chaque discipline gère sa propre épistémologie, développe ses propres méthodologies, selon leur objet d’étude. Peut-être que l’épistémologie et que les analyses conceptuelles ne sont pas importantes dans le cadre de leurs travaux, pourquoi pas ! Mais quand, factuellement, nous nous apercevons que sur 100 publications officielles, il y en a plus de 60% qui sont bonnes à foutre à la poubelle, parce que personne n’a réussi à reproduire leurs résultats, désolé mais ça craint quand même un peu.

    Ils ne donnent pas vraiment une bonne image de ce qu’est la science.

    Bonne soirée !

  • Membre Inconnu

    Membre
    23 novembre 2019 à 14 h 47 min

    Désolé pour les doublons ou triplons, il y a eu quelques bugs avec mes derniers messages, mais tout semble être rentré dans l’ordre 🙂

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